De cette histoire « à contre-temps », on retient aussi que la fin de sa puissance intervient au XIIIe siècle, lorsqu’elle est vaincue par sa rivale, Gênes, et doit peu à peu se soumettre au pouvoir florentin. Si on pense évidemment à la fameuse tour penchée lorsqu’on évoque Pise, c’est une erreur de croire qu’elle est le seul attrait de cette puissante cité maritime. La tour n’est que le campanile d’un ensemble architectural plus vaste, parfois appelé Piazza dei Miracoli, comprenant également le Duomo (la cathédrale), le baptistère et le Campo Santo (le cimetière monumental). Commencée en 1063, la construction de ce magnifique ensemble est financée par le butin ramené la même année du sac de Palerme, reprise aux Sarrazins. La cathédrale est l’exemple emblématique de l’art pisan, où l’architecture romane se teinte d’influences byzantines.
L’extérieur, qui alterne marbre clair et sombre, est conçu comme un reliquaire. C’est particulièrement évident lorsqu’on contemple la façade : pensée comme une pièce d’orfèvrerie, elle se distingue par ses quatre galeries en loggia qui creusent le mur en profondeur, derrière de fines colonnes, et permettent tout une gamme de jeu de lumière en fonction de l’ensoleillement.
A l’intérieur, le cul-de-four de l’abside s’orne d’une splendide mosaïque du Christ en majesté, œuvre de Cimabue achevée en 1302.
Mais l’œuvre la plus remarquable est sans doute la chaire sculptée à la même époque par Giovanni Pisano, représentant entre autres une série d’épisodes de la vie du Christ : là, le sculpteur atteint un sommet dans l’expression de ses personnages, adoucissant les lignes précises du style gothique mais en en gardant la vivacité et la précision.
Et que dire du reste de l’ensemble ? Outre la tour, dont l’inclinaison est due à la présence en sous-sol de deux nappes phréatiques, mais qui abrite sept cloches, car sa fonction première était d’être le campanile de la place, il faut mentionner le baptistère, le plus grand d’Italie, et visiter sa superbe coupole pyramidale.
La loggia qui le ceint fait le lien architectural avec le Duomo.
Enfin, il y a le Camposanto. A l’origine, c’est un cimetière dont la terre fut amenée du Golgotha en 1149, au retour de la deuxième croisade.
Puis, on commença à y construire une église, mais en cours de construction on décida que ce long bâtiment gothique resterait un cimetière, voué à recueillir les dépouilles des habitants de la ville les plus illustres. On y a aussi installé des sarcophages d’époque romaine et étrusque. L’arcature du cloître semble une véritable dentelle de pierre, bijou de précision et de délicatesse. Mais surtout, les murs sont ornés de fresques réalisées entre les XIVe et XVIIe siècles.
Détruites par un incendie causé par la chute d’une bombe en juillet 1944, elles ont ensuite été déposées et ont révélé les dessins préliminaires, les sinopies, aujourd’hui conservés dans un petit musée. Longuement restaurées, on peut aujourd’hui à nouveau les contempler, en particulier le magnifique « Triomphe de la Mort », attribué à Buffalmacco, et le cycle d’épisodes bibliques dû au talent de Benozzo Gozzoli.
Et pourtant, Pise ne se résume pas – non plus – à la Piazza dei Miracoli !
Que dire encore du monumental « Tuttomondo », la fresque de Keith Haring qui orne la façade arrière du couvent de l’église Saint-Antoine ? L’artiste a tenu, quelques mois avant à sa mort, à y représenter tous les êtres à même de peupler un monde en paix.